Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D´une femme inconnue, et que j´aime, et qui m´aime
Et qui n´est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m´aime, et me comprend.
Car elle me comprend, et mon coeur transparent
Pour elle seule, hélas! cesse d´être un problème
Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,
Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.
Est-elle brune, blonde ou rousse?-Je l´ignore.
Son nom? Je me souviens qu´il est doux et sonore
Comme ceux des aimés que la vie exila.
Son regard est pareil au regard des statues,
Et pour sa voix, lointaine, et calme, grave, elle a
L´inflexion des voix chères qui se sont tues.
Poèmes saturniens, 1866
Mi sueño familiar
Tengo a menudo este sueño extraño y penetrante
con una mujer desconocida, y a la que amo, y me ama
que nunca es del todo la misma
ni del todo otra, y me ama y me comprende.
Pues me comprende, y mi corazón, transparente
para ella sola, ay! deja de ser un problema
sólo para ella, y los trasudores de mi frente pálida
tan solo los sabe refrescar ella, llorando.
¿Es morena, rubia o pelirroja? Lo ignoro.
¿Su nombre? Recuerdo que es suave y sonoro
como los de los amados que la vida ha exiliado.
Su mirada es parecida a la mirada de las estatuas,
y su voz, lejana y calmada, y grave
tiene la inflexión de las voces queridas que se callaron.
Poemas saturnianos, 1866
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