Rainer María Rilke (1875-1926)
X
Amie des heures où aucun être ne reste,
où tout se refuse au cœur amer ;
consolatrice dont la présence atteste
tant de caresses qui flottent dans l’air.
Si l’on renonce à vivre, si l’on renie
ce qui était et ce qui peut arriver,
pense-t-on jamais assez à l’insistante amie
qui à côté de nous fait son œuvre de fée.
X
Amiga de las horas en las que nadie queda,
en que todo se niega al corazón amargo;
consoladora cuya presencia atestigua
tantas caricias que flotan en el aire.
Si renunciamos a vivir, si renegamos
de lo que era y de lo por venir,
¿pensamos, acaso, lo bastante en la insistente amiga
que a nuestro lado cumple con su labor de hada?
XVII
C’est toi qui prépares en toi
plus que toi, ton ultime essence.
Ce qui sort de toi, ce troublant émoi,
c’est ta danse.
Chaque pétale consent
et fait dans le vent
quelques pas odorants
invisibles.
O musique des yeux
toute entourée d’eux,
tu deviens au milieu
intangible.
XVII
Eres tú quien preparas en ti misma
algo más que tú, tu última esencia.
Lo que sale de ti, turbadora emoción,
es tu danza.
Cada pétalo consiente
y da en el viento
algunos pasos perfumados
invisibles.
Oh música de los ojos
toda rodeada por ellos,
te vuelves en el medio
intangible.
XXI
Cela ne te donne-t-il pas le vertige
de tourner autour de toi sur ta tige
pour te terminer, rose ronde ?
Mais quand ton propre élan t’inonde,
tu t’ignores dans ton bouton.
C’est un monde qui tourne en rond
pour que son calme centre ose
le rond repos de la ronde rose.
XXI
¿No te produce vértigo girar
en torno a ti misma sobre tu tallo
para terminarte, rosa redonda?
Pero cuando tu propio ímpetu te inunda,
en tu capullo te ignoras.
Es un mundo que gira en redondo
para que su calmo centro ose
el redondo reposo de la rosa redonda.
Les roses, 1949
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